Le roi Charles IV le Bel, décède le 1er février 1328, et la reine Jeanne1, enceinte accouche d’une fille le 1er avril de la même année, sans laisser d’héritier mâle.
Fils de Charles de Valois frère de Philippe le Bel et de Marguerite fille de Charles le Boiteux roi de Naples, neveu du roi défunt, Philippe VI de Valois est préféré comme roi de France à Edouard III, roi d’Angleterre, qui réclame la couronne de France comme petit fils de Philippe le Bel par sa mère Isabelle de France2. Il est couronné à Reims le 29 mai 1328.
Depuis l’an 996, c’est le premier prince qui accède au trône sans être fils de son prédécesseur.
Pieux, magnifique, chevaleresque, il vit fastueusement à Vincennes, où il cultive les choses de l’esprit et constitue une notable bibliothèque. Il lui est reproché son irréflexion et sa trop grande impulsivité.
Son règne est marqué par les nombreuses expéditions militaires en Flandre en faveur de Louis de Nevers où il vainc les Flamands à Cassel en 1328, mais surtout par le début de la guerre de cent ans contre les Anglais et Edouard III qui s’est proclamé roi de France. Philippe VI est vaincu à la bataille navale de l’Ecluse3 le 24 juin 1340 et sur terre à Crécy le 26 aout 1346.
Il accroit considérablement son domaine : en 1328 il réunit à son propre apanage, les comtés de Valois, d’Anjou et du Maine. Le 24 mai 1337, il fait saisir le duché de Guyenne. Le 30 mars 1349, il achète le Dauphiné à Humbert II de Viennois, et le 18 avril, au roi de Majorque les villes de Montpellier et de Lattes.
Philippe épouse en premiere noce Jeanne de Bourgogne4 de fâcheuse réputation. Boiteuse, détestée et calomniée par tous les chroniqueurs de son temps, elle mourut de la peste en 1348. En secondes noces, il épouse sa cousine Blanche d’Evreux, âgée de dix huit ans ; il eut six enfants dont Marie.
A sa mort il laisse un pays ravagé par la peste noire, amputé de plus du quart de son territoire, divisé et affaibli.
Pour le mariage de sa fille Marie qui épouse Jean de Brabant duc de Limbourg1, et pour la chevalerie de Jean le Bon, duc de Normandie son fils, le roi Philippe VI de Valois lève un subside en 1333 dans la province et le reste du royaume.
Quelques villes offrent de payer à raison de vingt sols2 par foyer. De nombreuses autres du Languedoc et du royaume, prétextant en être exemptés, refusent, et fournissent devant les sénéchaux les raisons de leur refus3.
Le roi, sur les représentations des communautés qui se prétendent exemptes de ce subside, donne une surséance pour la levée, le 30 juillet 1334, et ordonne de restituer ce qui a été payé par les villes. Après en avoir délibéré avec les prélats, les barons et les membres de son conseil, il décide avec son parlement (arrêt du 20 décembre), que les habitants des villes de son domaine, paieraient ce subside en totalité. Ceux des villes qui n’étaient qu’en partie de son domaine, n’en paieraient qu’une partie. Les autres qui étaient ses sujets par rapport à sa juridiction, sans faire partie de son domaine immédiat, ne paieraient rien.
Voici le texte latin ainsi que la traduction de cette ordonnance financière, qui est une des plus ancienne ayant un caractère proprement légistatif4.
Cum nos exigiere & levare faceremus per regnum nostrum subsidium nobis debitum racione seu pro milicia carissimi primogeniti nostri Johannis, ducis Normannie, plures diversarum villarum videlicet senescalie Bigorre, senescalie Tholose, juridicaturarum Riparie, Albigesii, Rivorum, Laugagesii,
Villelonge, civitatis Tholose,… Nemausi, ville Submidrii, castri de Cordua,… Sancte Gavelle,… burgi Carcasonne, Sancti Romani de Tarno,… Narbonne, Moisiaci,… Montispessulani, Aleti, Bastide de Tauriaco & plurium aliarum villarum se in contrarium opposuissent, aliquibus predictorum de domanio nostro & immediate subtitis in totum vel in parte existentibus, aliis solum quoad jurisdiccionem nobis subditis per pariagium, associationem vel alias, non tamen de nostro domanio in aliquo, ceteris vero nec de nostro domanio seu ratione jurisdiccionis nobis immediate subditis, sed pocius aliis dominis,ut dicebant ; plures proposuissent raciones ac eciam in scriptis tradidissent, certa eciam privilegia exhibentes ac producentes, ad finem quod pronunciaretur ipsos non teneri solvere predictum subsidium ; procuratore nostro ex adverso plures proponente rationes, ad finem quod, nom obstantibus propositis seu eciam exhibitis ex adverso, dictum subsidium nobis solvere tenerentur ; auditis igitur predictis partibus visisque rationibus hinc inde propositis & traditis ac eciam predictis privilegiis & aliis que tradere voluerunt, habita quoque super hiis deliberatione consilii cum prelatis, baronibus ac aliis de consilio nostro, per arrestum curie nostre dictum fuit ac eciam declaratum per hunc modum : videlicet quod habitatores dictarum villarum, que sunt de domanio nostro in totum nobis immediate subditi, integrum nobis solvent subsidium. Illi vero qui non sunt de domanio nostro in parte , in toto nobis immediate subditi, dictum solvent pro parte similiter subsidium. Ceteri vero, qui licet sint ratione jurisdicionis nobis subditi per periagium, associationem vel alias, non tamen de domanio nostro in aliquo, ut prefertur, vel qui non sunt nobis immediate subditi, subsidium nobis solvere non tenentur. XX° die decembris, anno XXXIIII°.
Comme nous avions fait ordonner et lever, à travers notre royaume, un subside dû de droit, soit en raison du service vassalique de notre très cher fils ainé Jean, duc de Normandie ; comme nombre de sénéchaux de diverses villes, à savoir celles de Bigorre, Toulouse et des juridictions de Riparie, d’Albi, de Rivorum, de Lauragais, Villelongue, de la cité de Toulouse,… des forteresses de Carcassonne, Saint-Romain du Tarn,… Nimes, de la ville de Sommières, de la place forte de Cordua ,… de Sancte Gavelle,… Narbonne, Moissac, Montpellier, Alès, Bastide de Tauriaco et de plusieurs autres villes s’y étaient au contraire opposées, certaines en tant que vassales directes de notre domaine en tout ou pour une part, d’autres seulement soumises à notre juridiction par pariage ou contrat et de ce fait non sujettes de notre seigneurie en quelque manière, comme elles l’affirmaient ; alors que nombre d’entre elles avaient présenté et même transmis par écrit des raisons, produisant et montrant même certains privilèges, à tel point qu’il fut prononcé n’avait pas à acquitter ledit subside ; alors qu’au contraire, en présentant de nombreuses raisons à notre procureur, et que pour finir, en dépit de ces propositions et explications, au contraire elles furent tenues de nous payer ledit subside ; alors que lesdites parties ayant été entendues et les raisons examinées et, à partir de là les propositions, les explications et même lesdits privilèges ou autre qu’ils avaient voulu transmettre, une délibération du conseil, avec les prélats, les barons et autres de notre conseil, ayant aussi eu lieu à ce sujet, il a été dit et même déclaré par arrêt de notre cour en ces termes : à savoir que les habitants des dites villes qui sont entièrement vassales directes de notre seigneurie nous payent intégralement le subside. Que ceux qui ne sont pas, pour leur part, entièrement vassaux directs de notre seigneurie, contribuent en partie, également, à cette aide. Que tous les autres qui sont nos vassaux en raison de notre juridiction, par pariage, contrat ou autre et qui, de ce fait, comme il a été énoncé, ne sont, de quelque manière, nos vassaux directs, ne soient pas tenus de nous payer le subside. Le 20 décembre, année 1334.
Sommières qui était du domaine royal dut donc payer le subside.
La pauvre Marie, mariée quelques mois, décéda en septembre 1333. Quant à son frère, on connait ses démêlés avec le Prince Noir et sa captivité à Londres où il mourut en 1364.