Close

Le drame Cathare – Site de Sommières et Son Histoire

Sommaire

  • LES SEIGNEURS DE LANGUE (…)
  • LES PAYSANS
  • LA CIVILISATION OCCITANE
  • L’EGLISE LANGUEDOCIENNE
  • L’HERESIE CATHARE OU ALBIGEOIS
  • REACTION DE L’EGLISE ROMAINE
  • CROISADE CONTRE LES ALBIGEOIS
  • SIMON DE MONTFORT
  • LA CONQUETE ROYALE
  • ROLE DES BERMOND DE SAUVE (…)

Les comtes de Toulouse

L’éloignement et l’extrême faiblesse du pouvoir central expliquent que, dans la région s’étendant du Rhône à la Garonne et des Cévennes aux Pyrénées, le morcellement féodal ait été plus précoce qu’ailleurs.
Cependant une famille n’a cessé de prédominer. Celle des Raimond de St Gilles. Comtes carolingiens, ils se sont soustraits très tôt à l’autorité royale. Comtes héréditaires, ils n’ont pu empêcher leurs viguiers de devenir vicomtes et d’asseoir leurs petites souverainetés.
Mais à peine leur grand fief est – il démembré, que les Raimond s’appliquent à le reconstituer. Ils y travailleront trois siècles, toutefois sans vraie continuité. Par exemple Alphonse Jourdain, fils de Raimond IV, se montre pendant quarante ans excellent administrateur. Il défend le comté contre Guillaume IX d’Aquitaine, puis contre les Catalans ; il acquiert le marquisat de Provence ( entre Durance et Drôme ).
Brusquement, il abandonne l’oeuvre inachevée, prend la croix et s’en va mourir en terre sainte, comme Raimond IV.
Ces Raimond sont des hommes étranges, plus soumis que les autres aux mirages de l’Orient ; c’est chez eux un besoin presque maladif que de partir pour des principautés lointaines.

Pourtant, lorsque Raimond V meurt ( 1194 ) et que lui succède son fils Raimond VI ( le vaincu de la guerre des Albigeois ) , l’unité languedocienne paraît acquise. Le grand fief comprend alors, en plus du comté de Toulouse qui est le noyau des possessions raimondines, les comtés de Foix et d’Armagnac, le duché de Narbonne, le marquisat de Provence, les quatre vicomtés Trencavel (Albi, Carcassonne, Béziers, Razès ), soit à peu près dix sept de nos départements.
En épousant Jeanne Plantagenêt, soeur de Richard Coeur de Lion, Raimond VI obtient en outre,l’Agenais et le Quercy.
C’est le plus haut feudataire du siècle. Il est infiniment plus riche que Philippe Auguste, le petit roi d’entre Somme et Loire. Mais est – il plus puissant ?
Les comtes de Foix et de Comminges ne perdent pas une occasion de se liguer contre lui. Son voisin Pierre II d’Aragon, cherche à joindre le Roussillon à Montpellier. Les Trencavel ne cessent de s’agiter : ils se sont plus ou moins donnés à l’Aragon de sorte que leur vicomté forme une sorte d’enclave.
Les vassaux de second rang ne sont guère plus dociles, s’ils sont moins inquiétants.
Le grand fief des Toulouse est plus une zone d’influence qu’une possession véritable. Et cet état de choses éclaire l’attitude de Raimond VI au début de la croisade
et explique dans une certaine mesure la défaite du Midi.

 LES SEIGNEURS DE LANGUE D’OC

“ Nulle terre sans Seigneur “ dit – on dans les pays de langue d’oïl.” Pas de Seigneur sans titre “ réplique le midi. Dans le nord les villas gallo – romaines sont devenues des fiefs, ou ont été incorporées à des fiefs. Dans le midi, elles subsistent sous le nom d’alleux.
Leurs possesseurs, les “ alleutiers “ , sont libres de toutes servitudes et francs d’impôts, sans pour autant avoir rang de seigneurs.
Dans le nord le vassal prête serment ; il s’engage corps et âme envers son suzerain. Dans le midi imprégné de droit romain, le vassal signe un contrat en bonne et due forme.
De plus le droit d’aînesse n’est pas appliqué,sauf dans les fiefs importants ; les seigneuries sont traitées en biens ordinaires et divisées en parts égales entre les héritiers, puis subdivisées.
Le château de Montréal est la copropriété de trente six chevaliers ; celui de Lombers , de cinquante ! Montredon, six.
C’est ce que l’on appelle le “ pariage”.
Autres raisons de la défaite albigeoise : d’un côté le relâchement du lien féodal, de l’autre le pariage.

 LES PAYSANS

Dès le XIème siècle, les serfs ont racheté leur liberté au seigneur,ou bien ce dernier les a spontanément affranchis.
Les vilains sont des “ bourgeois de campagne “,parfois aussi opulents que le seigneur en titre appauvri par les pariages. L’alleutier est sire dans son domaine. En comparaison de ces gens – là, le plus riche paysan du nord est un esclave.

LES BOURGEOIS

Nulle part l’ascension des marchands et des artisans n’a été aussi rapide que dans les agglomérations languedociennes. Dès 1131 Béziers possède son consulat, Montpellier en 1141, Nîmes en 1144, Narbonne en 1151, Toulouse en 1152. Bientôt les villes de moindre importance, puis les simples villages emboîtent le pas.
On a pu écrire que si l’unité territoriale des pays de langue d’oïl est le fief, en pays de langue d’oc, c’est la commune.
Certes les consuls ou capitouls ( oc : cap = tête, chef ) sont issus de l’ancienne cour seigeuriale ; il fut un temps où le seigneur les choisissait directement ou indirectement. Ils imposent leurs décisions au seigneur. Les grandes villes languedociennes du XIII siècle sont de véritables républiques ; elles traitent avec les puissances étrangères.
La petite noblesse recherche les dots bourgeoises ; la bourgeoisie donne des éperons de chevaliers à ses fils, et les hauts seigneurs admettent ces nouveaux chevaliers dans leur entourage.
Cette fusion des classes est le trait saillant du midi.

 LA CIVILISATION OCCITANE

“ L’avenir de la Méditerranée, écrivait la philosophe Simone Weil, repose sur les genoux des dieux. Mais une fois au cours de ces vingt deux siècles une civilisation méditerranéenne a surgi qui, peut-être, aurait avec le temps constitué un second miracle, qui, peut-être, aurait atteint un degré de liberté spirituelle aussi élevé que la Grèce antique, si on ne l’avait pas tuée.
Après le Xème siècle, la sécurité et la stabilité étaient devenues suffisantes pour le développement d’une civilisaion ; l’extraordinaire brassage accompli depuis la chute de l’Empire romain pouvait dès lors porter ses fruits. Il ne le pouvait nulle part au même degré, que dans ce pays d’oc, où le génie méditerranéen semble s’être alors concentré.
Les facteurs d’intolérance constitués en Italie par la présence du pape, en Espagne par la guerre ininterrompue contre les Maures, n’y avaient pas d’équivalent ; les richesses spirituelles y affluaient de toutes parts sans obstacles.
La marque nordique est assez visible dans une société avant tout chevaleresque ; l’influence arabe pénétrait facilement dans les pays étroitement liés à l’Aragon ; un prodige incompréhensible fit que le génie de la Perse prit racine dans cette terre et y fleurit, au temps même où il semble avoir pénétré jusqu’en Chine. Ce n’est pas tout peut-être ; ne voit -on pas à St Sernin à Toulouse, des têtes sculptées qui évoquent l’Egypte ? Les attaches de cette civilisation étaient ausi lointaines dans le temps que dans l’espace. Ces hommes furent les derniers peut-être pour qui l’Antiquité était chose vivante.
Si peu que l’on sache des Cathares, il semble clair qu’ils furent de quelque manière les héritiers de la pensée platonicienne, des doctrines initiatiques et desmystères de cette civilisation préromaine qui embrassait la Méditerranée et le Proche Orient ; et, par hasard ou autrement, leur doctrine rappelle par certains points, en même temps que Pythagore et Platon, la doctrine des druides qui autrefois avait imprégné la même terre…
Quels fruits une civilisation si riche d’éléments divers a-t-elle portés, aurait-elle portés ? Nous l’ignorons, on a coupé l’arbre. “.
Mais nous en connaissons les fleurs : l’absence de préjugés, l’esprit de tolérance, le lyrisme des troubadours, le catharisme.
Absence de préjugés : l’ami préféré du comte de Toulouse, c’est Raymond de Miraval, pauvre chevalier du Carcassès. Le très fêté Bernard de Ventadour est fils d’un domestique de son protecteur, dont il a pris le nom. La valeur personnelle a autant de prix que la naissance.
Esprit de tolérance : les Juifs enseignent librement la grammaire et les écritures dans leurs écoles ; certains accèdent aux charges officielles alors que, dans le nord, ils sont en butte aux pires humiliations. ( école juive de Lunel). Les maîtres arabes enseignent les mathématiques et l’astronomie, répandent des doctrines étranges venues, venues de l’Orient.
Quant aux troubadours, on en a dénombré plus de 460. Les plus connus sont Bernard de Ventadour, Bertrand de Born ( cité par Dante dans sa Divine Comédie ), Giraud de Borneil, Arnaut de Mareuil, Raimbaut d’Orange, Gavaudan, Gaucelm Faidit, Peire Vidal, Aimeric de Pegulhan.
Le thème d’inspiration est l’amour courtois, mais plus raffiné, plus mondain que dans le nord. Cet amour c’est le bonheur et la ristesse d’aimer. Gracieuse souffrance et timide espoir. La dame ne doit jamais être nommée ; elle est toujours la plus belle de toutes.
La nature a son rôle dans ces poèmes : elle y est rassurante, pleine de trilles de sources claires, de bosquets verdoyants et de roseraies, le décor habituel des “ jardins d’amour “.
Mais il y a aussi les troubadours qui lancent des appels aux armes ( les sirventès ), et fustigent les princes amollis par le luxe.

 L’EGLISE LANGUEDOCIENNE

De l’esprit de tolérance à la liberté de pensée il n’y a qu’un pas. Beaucoup de méridionaux l’ont franchi. De cela l’église languedocienne est responsable à cause de son inertie et de son incapacité. Elle dort sur ses richesses ; elle ne produit ni saints, ni penseurs, ni mouvements d’aucune sorte susceptibles de retenir les foules. Elle a tous les défauts de l’église du nord mais non ses qualités. Ses dignitaires mènent une existece scandaleuse : ils s’adonnent à la chasse, s’entourent de courtisanes, vendent les indulgences et les bénéfices, se dispensent de visiter leurs diocèses. Quelques-uns sont déposés à la suite d’enquêtes effectuées par les légats du pape.
“ Ces aveugles, fulmine Innocent III, ces chiens muets qui ne savent aboyer, ces simoniaques ( simonie = trafic de choses saintes ) qui vendent la justice, absolvant le riche et condamnant le pauvre, n’observant même pas les lois de l’église ; ils cumulent les bénéfices et confient les sacerdoces et les dignités ecclésiastiques à des prêtres indignes, à des enfants illettrés : de là l’insolence des hérétiques, de là le mépris des seigneurs et du peuple pour Dieu et son église. Les prélats sont dans cette région la fable des laïques.”
Il y a pis. Certains de ces prélats refusent d’agir contre les hérétiques, tel Guillaume de Roquessels, évêque de Béziers ( 1205 ), tel Bertrand de la Barthe, archevêque d’Auch ( 1214 ).
Quant aux simples curés vivant parmi leurs ouailles, ils sont réduits à l’impuissance ou bien, comme leurs émules de 1789, ils se déclarent en faveur des idées nouvelles.

 L’HERESIE CATHARE OU ALBIGEOISE

Cathare vient du grec KaqaroV, qui signifie “ pur “.Les prêtres cathares sont appelés Purs, Parfaits, Revêtus, Bons Hommes. Et par leurs ennemis : Patarins.
Ce que l’on sait du catharisme provient des registres de l’Inquisition où sont consignés les aveux plus ou moins arrachés par la torture ou par la crainte, et quelques rares livres hérétiques : le Rituel de Lyon, le Livre des Deux Principes, la Vision d’Isaïe, la Cène Secrète.( lire Montaillou village occitan de Leroy Ladurie ).
Le catharisme paraît être un surgeon d’hérésies plus anciennes, surtout du manichéisme. Au IIIème siècle, Manès ( né en Perse ), avait tenté de concilier les dogmes du christianisme avec la pensée grecque et les religions orientales.
Puisant dans le Nouveau Testament, dans les enseignements de Boudha et de Zoroastre, de Pythagore et de Platon, il avait opéré ne vaste sythèse de la pensée humaine et jeté les bases d’une religion axée sur le double principe du Bien et du Mal.
Il périt dans les supplices, mais sa doctrine lui a survécu. Bien que saint Augustin les ait condamnés, les disciples de Manès ont persisté. On les retrouve aux XIè et XIIème siècles à Constantinople, sous la dénomination de Bogomiles ( les Bulgares ).
Au XIIème, ils essaiment en Italie et en France. Il leur est facile de s’implanter dans les terres d’oc où l’on réserve si large accueil aux étrangers, pour peu qu’ils intéressent. En 1167, l’évêque Nicetas, un manichéen de Constantinople, préside le Concile hérétique de St Félix de Caraman ( Haute Garonne ).
Il n’est pas contradictoire de prétendre, comme l’ont fait plusieurs auteurs, que la catharisme occitan diffère du manichéisme originel et se nuance de druidisme : les druides, par exemple, croyaient à la métempsycose ( l’âme peut passer d’un être à un ou plusieurs autres êtres ).
Quoi qu’il en soit, le catharisme, de même que le manichéisme, repose sur la coexistence de deux principes, des Ténèbres et de la Lumière, de la Matière et de l’Esprit, de Sathanaël ( Satan ) et de Dieu. Ange rebelle et puni de sa rébellion, Satan se venge en attirant à lui les âmes séjournant dans les Demeures célestes. Il a créé la Terre pour avoir un royaume, inventé la chair corruptible pour y emprisonner les âmes, avoir un peuple à lui. La Matière est son invention propre.
Le Christ des cathares n’est pas celui des catholiques romains, la croix n’est pas la même, le Christ n’est pas dans son supplice, mais dans sa majesté : un rédempteur triomphant. Esprit pur, il n’ a pu revêtir notre enveloppe corporelle. L’imiter c’est donc essayer de se libérer de cette enveloppe : par une vie exemplaire, par les jeûnes, la chasteté, les macérations ( mortifications ).
Celui qui meurt englué dans la Matière, revit dans un autre corps, parfois celui d’un animal : voilà pourquoi les Parfaits s’abstiennent de tuer les bêtes qu’ils considèrent comme porteuses d’âmes en pénitence.
Il n’est d’enfer que terrestre. Se marier, procréer, c’est aux yeux des Parfaits prolonger le règne de Satan, provoquer la tentation et la chute d’âmes innocentes. Mais se référant à la Cène Secrète où sont relatées les confidences du Christ à Saint Jean, les cathares croient que Satan, un jour, rendra toutes choses à Dieu. Leur croix à branches égales symbolise cette restitution totale ; elle indique que tous les hommes finiront par être sauvés.
Le catharisme est une religion sans église et sans argent. Les Parfaits vont par deux ( la secte désigne le “ socius “=compagnon de chaque nouveau “ revêtu “ ), de village en village, prêchant sur les places, soignant les malades, aidant les travailleurs, vivant de charité publique. Les dignitaires (l’évêque et ses coadjuteurs : le “ filius major” et le” filius minor” ) ne se distinguent des simples Parfaits que par l’excellence de leurs vertus.
Les seuls biens que possède la secte, ce sont les écoles. Très volontiers les riches ( nobles et bourgeois ) confient leurs enfants aux prêtres nouveaux.
Les Parfaits ont reçu le “ consolamentum “ qui est un sacrement unique. En le recevant ils se sont engagés à mener une existence d’extrême austérité et de dévouement, à ne jamais renier leur foi même sous la menace de la mort. Les femmes peuvent recevoir le “ consolamentum “, on les appelle ensuite des Parfaites.
La foule des Croyants n’a par contre que très peu d’obligations. D’où le reproche si souvent formulé que l’albigéisme est une religion sans moeurs, autorisant les pires licences.
Les Croyants disposent d’eux-mêmes ; ils sont libres de s’engager dans le chemin de la Perfection, ou se vautrer dans la Matière. On ne leur impose que de plier le genou ( melioramentum ) devant les Parfaits qui portent en eux l’esprit saint, le Paraclet. Une fois par mois, ils ont la faculté de se confesser publiquement ( apparelhamentum ), en présence d’un Parfait. Ils peuvent eux aussi se libérer de l’enveloppe satanique en recevant le “ Consolamentum ad vitam “ ou “ ad mortem “ : mais s’ils guérissaient, ils devaient abandonner leurs biens et leur famille pour suivre les Parfaits.

 REACTION DE L’EGLISE ROMAINE

Les Parfaits n’ont qu’un défaut : ils haïssent l’église romaine et ne se gênent pas pour la traiter de “ synagogue de Satan “, pour railler les sacrements qu’elle a institués. Rome ne s’émeut pas tout de suite. Elle attend que ses temples et ses abbayes soient désertés.
Sans doute les Patarins ont-ils été déclarés hérétiques et frappés d’excommunication au concile de 1119 ; mais aucune mesure efficace n’a été prise.
Quand St Bernard parcourt le midi, il y est mal reçu. A la suite du concile de Tours en 1163 qui renouvelle la condamnation de 1119, les missions se succèdent, mais sans succès. Ce n’est qu’en 1179 que le pape Alexandre III lance un premier appel au bras séculier, avouant ainsi l’impuissance de l’église à combattre l’hérésie.
Innocent III monte sur le trône de St Pierre ( 1198 ), et reprend la lutte sur le plan spirituel. Mais c’est en vain qu’il épure le haut clergé languedocien et organise des conférences avec les dignitaires de la secte albigeoise. En dépit de ses efforts, des miracles de St Dominique, des prédications des cisterciens, il échoue. Il tente alors de convaincre Raimond VI de Toulouse d’extirper “ manu militari “ l’hérésie de ses domaines.
Raimond VI se dérobe. Bien que fidèle à l’église, il a de l’estime pour ces cathares. De plus, nombre de ses vassaux comptent desh érétiques revêtus dans leur famille. Innocent III se tourne vers Philippe Auguste, mais le roi de France s’occupe à reconquérir les provinces perdues lors du divorce de son père ; il est aussi trop habile pour essayer de cueillir un frui vert.
Pierre II d’Aragon passe pour un bon chrétien, mais l’introduire en France ce serait déplaire à Philippe Auguste. Faute de mieux le pape s’adresse aux grands barons : le duc de Bourgogne, les comtes de Bar et de Nevers, de Dreux et de Champagne.
Mais Raimond VI, flairant le danger, mande le légat Pierre de Castelnau afin d’obtenir un arrangement. L’entrevue tourne court. Le 14 janvier 1208, à Trinquetaille, comme le légat s’apprête à traverser le Rhône, il tombe percé par la lance d’un chevalier toulousain.
C’est une irréparable maladresse politique. Le pape doit punir l’insulte. Aucune considération ne l’arrêtera. Lui qui a déclaré : “ la pitié prime le droit “, va déchaîner les foudres de sa colère contre les insoumis.
La croisade, prêchée par Arnaud Amaury, abbé de Cîteaux, soulève un véritable enthousiasme. C’est que l’on n’aime guère les gens de langue d’oc, mangeurs d’ail et d’olives. C’est aussi que le pape octroie l’indulgence plénière aux croisés et que les terres du comté de Toulouse sont “ exposées en proie”.
Raimond VI presse son neveu Raimond Roger Trencavel de faire front commun devant l’envahisseur. Trencavel refuse.
Raimond VI affolé, va se jeter aux pieds du légat Arnaud Amaury et, comme l’empereur allemand à Canossa, s’humilie à St Gilles. Selon les engagements qu’il a souscrits, il prend la croix et guide l’armée du Nord sur les terres de Trencavel.
Il espère amadouer ainsi les hommes de l’église et, peut-être, rétablir son
autorité sur les vicomtés rebelles.
Les croisés, rassemblés à Lyon, descendent la vallée du Rhône, font halte à Montpellier, envahissent le vicomté de Béziers en juillet 1209. La guerre de sécession languedocienne a commencé. Elle durera 35 ans et après la chute de Montségur, ultime citadelle et lieu saint du catharisme, elle aboutira à la suppression de l’hérésie, à la destruction de la civilisisation occitane et au rattachement des pays de langue d’oc à la couronne.

 CROISADE CONTRE LES ALBIGEOIS

Les préliminaires.

1179. A la suite de l’échec de la mission de St Bernard, le pape Alexandre III lance un premier appel au bras séculier.

1181. Première croisade armée ; siège de Lavaur. L’hérésie triomphe jusqu’à l’avènement du Pape Innocent III. Vaines prédications des légats romains.

1198. Avènement d’Innocent III.

1200 – 1204. Epuration du haut clergé languedocien.

1206. Début de la mision de St Dominique.

1207. Les conférences entre les évêques cathares et les légats de Rome. Le miracle du feu.

1208. 14 janvier : assassinat du légat Pierre de Castelnau à Trinquetailles. Innocent III fait prêcher la Croisade contre les albigeois, par Arnaud Amaury, abbé de Cîteaux.

1209. 22 juillet : prise de Béziers par les Croisés.

1209. 1er au 15 août : siège et reddition de Carcassonne. Les grands barons abandonnent Simon de Montfort après l’avoir élu chef de la Croisade et vicomte à la place de Trencavel.
Trencavel meurt opportunément. La révolte gronde dans le haut Languedoc.

 SIMON DE MONTFORT

1210. Il reçoit des renforts au printemps. En juin-juillet, siège et prise de Minerve, avec l’aide des Narbonnais. En août-novembre, prise de Termes.

1211. Poursuivant méthodiquement sa conquête, il s’empare de Lastours et de Lavaur. La possession de ces deux places fortes, outre Minerve et Termes, lui assure la maîtrise des vicomtés Trencavel. Raimond VI de Toulouse réagit enfin : bataille indécise de Castelnaudary.

1212. Simon de Montfort conquiert le comté de Toulouse à l’exception de cette ville et de Montauban. Il promulgue les statuts de Pamiers pour organiser sa conquête.

1213. Raimond VI regroupe ses vassaux et s’allie à Pierre II , roi d’Aragon. Mort de Pierre II et défaite de Muret.

1215. Concile de Latran : Innocent III partage le Midi entre Simon ( le Languedoc ) et Raimond VI ( la Provence ).

1216. Retour triomphal des Raimond père et fils. Réveil du patriotisme occitan.
Simon de Montfort échoue devant Beaucaire.

1218. Siège de Toulouse et mort de Simon de Montfort. Son fils Amaury lève le siège.

1219. Nouveau siège de Toulouse par le prince Louis, futur Louis VIII. Nouvel échec.

1222. Mort de Raimond VI. Son fils lui succède sous le nom de Raimond VII.

1224. Amaury de Montfort renonce à la lutte et offre ses domaines au roi de France.

 LA CONQUETE ROYALE

1226. Prise d’Avignon, jusque -là réputée imprenable, par Louis VIII. Le Midi est frappé de stupeur. Nouveau renversement de la situation. Les vicomtés Trencavel, le Languedoc oriental et septentrional se soumettent au roi.
Promulgation de l’Ordonnance royale rendant légal le supplice du bûcher
pour les hérétiques.

1229. Raimond VII abandonné par ses vassaux renonce à la lutte. Il signe avec Blanche de Castille le traité de Meaux par lequel il fiance sa fille Jeanne de Toulouse au frère de Louis IX, Alphonse de Poitiers, et accepte de n’être que l’usufruitier de ses biens.
Le Concile de Toulouse rend obligatoire la dénonciation des hérétiques.

1233. Fondation de l’Inquisition, confiée aux Dominicains, par le pape Grégoire IX.

1240. Révolte du vicomte Trencavel, fils de Raimond Roger, assassiné par Montfort en 1209. Il échoue devant Carcassonne.

1242. Révolte de Raimond VII. Mais trahi par le comte de Foix, perdant tout espoir dans l’efficacité de son alliance avec le roi d’Angleterre Henri III ( défaite de Taillebourg – Charentes Maritimes- ) , il se soumet définitivement à Louis IX.
Les “ faidits “, seigneurs dépossédés, poursuivent la résistance.
Meurtre de plusieurs inquisiteurs à Avignon.

1243-1244. Siège et prise de Montségur, dernier repaire important des faidits et temple du catharisme.

1249. Mort de Raimond VII. Ses biens reviennent à sa fille, épouse d’Alphonse de Poitiers.

1271. Alphonse de Poitiers et Jeanne de Toulouse meurent à quelques jours d’intervalle :

RATTACHEMENT DU LANGUEDOC A LA FRANCE.

BIBLIOGRAPHIE

Pierre BELPERRON : la Croisade contre les Albigeois
Michel ROQUEBERT : l’Epopée Cathare ( 4 tomes )
Michel ROQUEBERT-Christian SOULA : Citadelles du Vertige
René NELLI : Histoire du Languedoc
IEO ( LAFONT-ARMENGAUD ) : Histoire d’Occitanie.

 ROLE DES BERMOND DE SAUVE ET ANDUZE

En 1216, Simon de Montfort, qui est haï par tous, part pour rendre hommage à Philippe Auguste.
Cest le signal du soulèvement général. Raimond VI et son fils Raimond VII font un retour triomphal, et peu à peu reprennent leurs territoires et leurs villes.
Simon de Monfort revient en toute hâte. Au passage, il assiège Beaucaire, mais échoue. Il tente alors le siège de Toulouse, mais il est tué d’une pierre à la tête.
Son fils, Amaury, le remplace, mais il est incapable de résister aux Languedociens.
Pierre BERMOND VII prend le parti de son grand-père Raimond VI de Toulouse qui lui donne des châteaux et des terres. De plus, en 1223, il récupère des terres dont il avait été dépossédé et pour remercier l’église de l’avoir aidé dans cette affaire, il fonde cette même année , à Sommières, le couvent des Cordeliers, actuelle maison de retraite. ( Cordeliers = ordre fondé par St François d’Assise. ).
Amaury, ayant offert ses domaines au roi ( 1224 ), c’est Louis VIII qui s’engage dans une nouvelle guerre ( 1226 ).
Pierre Bermond VII, peu courageux, sentant le vent tourner, se rend à Paris au mois de mai 1226 et fait hommage au roi pour tous ses biens.
Louis VIII ne trouve guère de résistance lorsqu’il arrive en Languedoc. Pour preuve, la prise d’Avignon et Raimond VII, esseulé, est bien obligé de signer le traité de Meaux ( avril 1229 ), par lequel il renonce au Languedoc du Rhône jusqu’à Toulouse en faveur de Louis IX ( régence de Blanche de Castille ).
Une lutte d’influences s’engage entre Pierre Bermond VII et le Sénéchal de Beaucaire qui réunit les pouvoirs administratifs, militaires et judiciaires.
Le résultat en est que Pierre Bermond VII se voit confisquer la moitié de la ville de Sommières qu’il avait pu conserver, et la ville de Sauve.
En 1243, il a tout perdu ; le roi lui prend tout et lui laisse le château et la ville de Roquedur – région du Vigan – ; il lui octroie une rente de 600 livres sur le pays d’Hierle, mais il lui interdit, ainsi qu’à ses héritiers, d’entrer dans Alès, Anduze, Sauve, Sommières.
Le roi maître de la moitié de Sommières et du château où il avait fait bâtir à la hâte une tour, ne tarde pas à prendre alors l’autre moitié qui appartenait au frère de Pierre Bermond VII, Bermond de Sauve, qui jusque là avait réussi à conserver quelques biens.
Sommières passe sous la juridiction du roi de France et l’autorité du Sénéchal de Beaucaire, bien avant l’ensemble du Languedoc. C’est aussi le cas de la petite forteresse de Montredon sur la rive droite du Vidourle dont la famille est alliée des Guilhem de Montpellier.
Pourquoi cette rapide mainmise ? Cela s’explique par le fait que le Vidourle est la frontière entre la Sénéchaussée de Beaucaire et le fief de Guillem de Montpellier, dont l’héritière, Marie, a épousé le 15 juin 1204, Pierre d’Aragon.
Les Guillem ont rendu hommage aux évêques de Maguelonne et de ce fait au
pape ; le roi de France ne peut se permettre d’envahir leurs terres. Il se contentera de leur prendre les deux petites forteresses de Montredon et de la Roque Aynier, près de Ganges, qu’il ne rendra jamais, malgré plusieurs lettres de l’évêque et même du pape.
Montpellier ne rentrera dans le domaine royal qu’au mois d’avril 1349, date à laquelle Philippe VI de Valois achètera à Jacques III de Majorque la ville ainsi que Lattes pour la somme de 120 000 écus d’or payables en trois termes égaux. ( J. Baumel. Histoire d’une Seigneurie du Midi de la France. ).
Une fois de plus on s’aperçoit de la valeur stratégique et militaire de la ville et du château de Sommières.

En août 1248, aura lieu, entre le roi et l’abbé de Psalmodi, l’échange du territoire et ville d’Aigues Mortes contre les Condamines.